Informer les consommateurs sur les désodorisants combustibles

    Informer les consommateurs sur les désodorisants combustibles

    Selon TNS Sofres, 20% des français brûlent de l’encens dans leur habitation, une pratique datant souvent de plusieurs dizaines d’années. Or, les dernières études réalisées, notamment celles de l’INERIS en 2011 et 2015, démontrent le risque sanitaire élevé lié à l’utilisation des désodorisants combustibles. Les travaux mettent en lumière la production de nombreux composés organiques volatils (COV – benzènes, formaldéhyde, etc), les encens étant les plus émissifs.

     

    Saisie de l’ANSES

    Le ministère de l’environnement a saisi l’ANSES en décembre 2016 pour avis sur un projet de décret relatif à l’étiquetage des désodorisants combustibles. Il s’agit d’une obligation légale pour le Gouvernement de consulter cette instance avant l’adoption d’un décret. Le projet de texte répond « à l’action 49 du troisième Plan national santé environnement 2015-2019 : «Mettre en œuvre le plan qualité de l’air intérieur (PQAI) ».

     Dans ses conclusions, l’ANSES émet un avis négatif sur le projet de décret. En premier lieu, le PQAI cité ci-dessus préconisait l’interdiction des produits les plus polluants, ce qui n’est pas adopté dans le décret. L’étiquetage prévu dans le PQAI devait de plus mentionner non pas uniquement des précautions d’usage mais aussi les émissions en polluants volatils. L’ANSES conclut en soulignant que « la mesure de gestion ici proposée liée à la diffusion d’informations de sécurité relatives à l’usage des produits reporte sur les consommateurs la responsabilité finale de l’exposition et la charge de s’en protéger. »

     

    Une position confirmée par une nouvelle étude de l’INERIS

     L’ADEME (Agence de l’environnement et de la Maîtrise de l’Energie) a dans le cadre de son projet expérimental analysé les émissions de polluants volatils et particulaires de neuf bâtons d’encens, neuf bougies parfumées et d’une lampe catalyse. Cette expérimentation s’est déroulée dans des conditions réalistes, au sein d’une pièce de la Maison Automatisée pour des Recherches Innovantes sur l’Air (MARIA). Elle a eu pour objectif de mettre en évidence dans ces conditions réelle d’utilisation d’un produit parfumée à combustion, les émissions de particules volatiles dans l’air. Cela a permis par la suite de mesurer les niveaux de concentrations de particules auxquels sont exposés les usagers, pour ensuite pouvoir évaluer les risques sanitaires liés à ces utilisations.

     Les conclusions publiées en juillet 2017 viennent confirmer les résultats des études précédentes et la nécessité d’adopter des mesures concrètes pour protéger les consommateurs au regard de la dangerosité des polluants émis lors de la combustion des encens et bougies.

     En mars 2017, l’association 60 millions de consommateurs prévient des risques toxiques de composants chimiques contenus dans des produits désodorisants à combustion, elle a publié une liste de 46 produits. Les étiquettes de ces produits sont considérées comme étant incomplètes selon l’association 60 millions de consommateurs.

     

    Contenu du décret définitif

    Il faut mentionner ici que le Gouvernement a choisi de ne pas suivre l’avis de l’ANSES.

    Un désodorisant à combustion est défini par le décret comme un « produit constitué d’un matériau combustible parfumé qui, sous l’action de la combustion, dégage dans l’air les substances odorantes qu’il contient ». Cela concerne donc principalement les bougies et l’encens.

    Il est ici regrettable que ne soient pas inclus les désodorisants en spray ou non combustibles qui ne sont pas moins dangereux. De plus, sont oubliés les produits d’entretien qui pourtant figuraient dans le Plan National Santé Environnement (PNSE).

    L’étiquetage de ces produits doit afficher plusieurs informations sur les précautions à prendre lors de leur utilisation. Cela concerne les produits vendus ou distribués à titre gratuit. Les informations doivent porter sur :

    • La ventilation de la pièce après utilisation du produit,
    • L’absence d’inhalation directe de la fumée.

    Il n’y aura donc pas d’obligation d’afficher le nom des substances ou un chiffre sur les émissions de composés organiques volatils (COV) du produit, comme le préconisait l’ANSES.

    Les informations doivent figurer de manière visible et lisible sur les emballages. Elles sont présentées sous forme de mentions rédigées en langue française ou sous forme de symboles. Le décret renvoie à la norme NF EN 16 740. Les étiquetages conformes à cette norme sont présumés conforme aux exigences du décret. Le décret ne s’applique pas aux produits commercialisés de la France vers d’autres États européens qui assurent un niveau équivalent d’information des consommateurs. Le décret relatif à l’étiquetage des désodorisants à combustion du 10 mai 2017 ne sera obligatoire qu’au 1er janvier 2019. De plus, les produits mis sur le marché avant cette date pourront être commercialisés jusqu’à l’épuisement des stocks.

    Pour conclure, le Gouvernement actuel a tout intérêt à revoir les normes qui protègent les consommateurs, pour qu’enfin soient adoptées des mesures ayant un effet réel, et non des demi-mesures n’ayant aucune conséquence sur la prévention réelle des risques sanitaires liées à la qualité de l’air intérieur.

    Avis de l’ANSES du 10 février 2017

    Étude réalisée par l’INERIS – Juillet 2017

    Décret n°2017-946 du 10 mai 2017 relatif à l’étiquetage des produits désodorisant à combustion sur les informations de sécurité pour l’utilisateur

     

    elise lamarreElise Lamarre,
    Juriste à l’agence Primum Non Nocere, Doctorante à l’université de Montpellier. Titre de la thèse : « Approche juridique des confrontations entre santé et environnement»

    Article rédigé en collaboration avec  Audrey Ibo, stagiaire de Primum Juris.

     

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