Une usine pour purifier l’air du CO2 et l’enfouir sous terre … mais en Islande.

    Une usine pour purifier l’air du CO2 et l’enfouir sous terre

    Cette usine vient d’être inaugurée mais c’est en Islande où l’entreprise suisse Climeworks projette d’extraire 4 000 tonnes de CO2 de l’air par an, pour la stocker sous terre. Objectif : éliminer 1 % des gaz à effets de serre émis sur Terre d’ici à 2025, purifier l’air et ainsi limiter le réchauffement climatique … en conséquence bien entendu.

     

    Quoi de vraiment neuf ? 

    Captage et stockage de CO2 se pratiquent déjà. Notamment par les entreprises les plus émettrices en carbone : centrales électriques au gaz ou au fioul – raffineries de pétrole.

    Le processus consiste à filtrer directement le gaz à la sortie des cheminées des bâtiments – ce qui est plus facile et moins coûteux que dans l’air :

    – concentration en volume de 4 % à 40 % de plus que dans l’air où le CO2 est extrêmement dilué : de l’ordre de 0,04.

    Mais dans le cas de l’usine islandaise qui nous occupe ici, l’innovation consiste à allier filtrage de l’air et enfouissement souterrain,  suivant les recommandations du GIEC qui considère que limiter les émissions de CO2 dans l’air (à la sortie des cheminées) doit être complété par l’extraction de CO2 dans l’atmosphère.

     

    Limiter le réchauffement climatique en recréant une réaction chimique naturelle.

    C’est près de Reykjavik, en Islande, que la première installation de la start-up Climeworks a été édifiée, après plusieurs années de tests. Le choix du lieu est stratégique, puisqu’au cœur de ces grandes plaines islandaises se trouve une centrale géothermique. L’installation est ainsi alimentée par les énergies renouvelables voisines. Ce projet pilote, baptisé « Orca », « énergie » en islandais, a donc pour objectif d’enfouir un maximum de CO2 solidifié à plus de 1 000 mètres de profondeur. L’usine est en capacité d’aspirer le CO2 présent dans l’atmosphère, pour le pétrifier à jamais dans la roche !

    Les scientifiques du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) estiment qu’il est encore temps d’agir sur la limitation et la suppression totale de gaz à effets de serre. L’accord de Paris ratifié en 2015 avait posé un cap planétaire à ne pas franchir, la barre symbolique de +1,5°C. Aujourd’hui, selon un article des Nations Unies, cet objectif ne serait pas atteignable, sauf en cas de changement drastique et imminent. « Il y a déjà dans le monde une trentaine d’installations de taille industrielle qui captent le CO2 émis par diverses industries pour éviter de le relâcher dans l’atmosphère, puis qui le stockent dans le sous-sol de manière permanente. (…) Elles permettent d’éviter le rejet de 40 millions de tonnes de CO2 par an. Au vu de l’urgence climatique, il faut accélérer le déploiement de ce type de solutions dans tous les territoires qui s’y prêtent ».

    Les scientifiques appellent à une stabilisation du climat afin de réduire les dégâts liés au réchauffement climatique. Or les causes de l’excès de CO2 présent dans l’air sont directement liées à l’activité humaine. « On a extrait du carbone du sous-sol (pétrole, charbon, gaz naturel) pour nos besoins énergétiques. En le brûlant, on émet du CO2. Donc, renvoyons ce carbone dans le sous-sol, en stockant le CO2 sous terre. C’est le puits de carbone géologique qui offre un moyen efficace pour réduire les émissions résiduelles incompressibles de CO2 des installations industrielles » insiste l’experte.

    Orca a vu le jour grâce à l’association de Climeworks à l’ingénierie du système islandais Carbfix. Pour récupérer le plus de CO2 et tenter d’agir contre ses effets néfastes dans l’atmosphère, Climeworks a réalisé la plus grosse levée de fond de l’année 2020, en Suisse. 92 144 500,00 euros pour reproduire en deux ans ce que la nature fait elle-même en plusieurs milliers d’années. Le processus est tel qu’il reproduit ce que l’on appelle la minéralisation.

    Le procédé consiste à brasser et aspirer l’air par de grands ventilateurs à tailles humaines et à le faire passer à travers des filtres éponges. On augmente ensuite la température sur ces filtres pour extraire le dioxyde de carbone. Le gaz est ensuite plongé dans de l’eau et envoyé très loin sous terre. La réaction chimique permet à l’ancien gaz carbonique de refroidir et de se figer pour toujours.

    Ce qui nécessite une roche réservoir, poreuse et perméable, de type calcaire ou grès et située à au moins un kilomètre de profondeur. La température et la pression sont telles que le CO2 n’est plus à l’état gazeux. Il est très dense comme un liquide et vient se loger dans la porosité de la roche, entre les minéraux, comme de l’eau dans une éponge. Il est donc nécessaire de sélectionner des formations géologiques suffisamment imperméables et argileuses pour pouvoir s’assurer que le CO2 ne pourra plus s’évaporer. C’est ainsi qu’on a repéré des gisements naturels de CO2 sous terre. « Rien qu’en France, on en a découvert huit qui se sont formés il y a des millions d’années ».

     

    Quels inconvénients possibles ?

    En d’autres termes, peut-on craindre d’éventuels impacts néfastes pour les sols ? Comme, par exemple, le colmatage des voies de circulation de l’eau par les précipitations de minéraux carbonatés ? Ce qui forcerait à limiter cette pratique.

     

    Les bénéfices attendus :

    Orca – du nom de cette initiative islandaise – devrait compenser en une année l’impact carbone de toute la durée d’utilisation de 870 voitures. Ou encore 4 000 vols Paris-New-York.

    Ce n’est pas miraculeux, mais c’est un début et Orca sert de vitrine et de modèle à toutes les entreprises qui veulent lutter contre l’impact climatique négatif qu’induit leur activité.

     

    Des réserves…

    Elles sont réelles et justifiées par des coûts qui remettent en question l’efficacité du projet. Bref, au-delà de cette initiative, il va être nécessaire d’adopter diverses solutions différentes de captage et de stockage du CO2. Les méthodes à adopter seront directement dépendantes de la nature des roches en profondeur qui conditionnera le type de stockage et sa localisation.

    Chaque territoire devra donc choisir les solutions les plus adaptées selon ses spécificités et ses besoins de décarbonation.

    En un mot : la nature aura toujours le dernier mot sur la technoscience.

     

    Lire aussi : Les estimations chiffrées du coût de la pollution de l’air

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