De sérieux doutes sur les plastiques « biodégradables » et « biosourcés »

    bouteille en plastique

    Essayons d’abord de mesurer le phénomène « plastiques ».

    Les chiffres avancés par les plus récentes études sont effarants :

    • 8 millions de tonnes de déchets plastiques déversés dans l’océan chaque année selon l’ONU.
    • 1 200 particules plastiques par litre dans les glaces de l’Océan Arctique, montrent les scientifiques de l’AWI.
    • Un continent de plastique couvrant près de 6 fois la France dans le Pacifique Nord, qui s’accroît de 80 000 km2 par an.
    • En Europe, 30 % des déchets plastiques sont recyclés, en moyenne. Alors que leur dégradation peut prendre entre 100 et 400 ans, 80 % des sacs plastiques ne sont ni triés ni recyclés.
    • 40 % du plastique fabriqué dans le monde sert à l’emballage.

    Après les chiffres – consternants – envisageons le problème de fond.

    Nous savons que les plastiques sont issus du pétrole. Ce sont eux qui sont à la source de cette pollution planétaire qui menace de nous engloutir.

    Mais, voyant le danger – pour ses intérêts commerciaux bien sûr – le « système » toujours apte aux métamorphoses susceptibles de le faire perdurer, a lancé  de nouveaux sacs sur le marché, dument présentés comme issus de ressources renouvelables.

    Ces sacs sont d’ailleurs commercialisés avec l’estampille  « biodégradables » ou « biosourcés ». On respire : la planète est sauvée !

    Une copie à revoir.

    Mais voilà, on respire sans doute trop tôt car un rapport du programme des nations unies pour l’environnement révèle une coquille dans cette appellation « un petit rien, une broutille » comme dit la chanson.

    Vous avez dit « biodégradable » ? vraiment ?

     Une seule phrase du rapport vient effacer le soulagement éprouvé à l’annonce faite ci-dessus. La voici : « Le problème se situe au niveau de la température d’élimination des plastiques biodégradables qui doit être très élevée.  Cette condition n’existe pas dans la nature ».

    Les industriels comptent peut-être sur le changement climatique ? Qui sait ?

    Vous avez dit « biosourcés ».

    Vlan, le rapport vient éteindre notre enthousiasme tout en révélant la profonde duplicité de ceux qui veulent nous fourguer des « sacs biodégradables »

    Que dit-il ?

    « Certains polymères biosourcés comme le polyéthylène (PE)  issu du bioéthanol ne sont pas biodégradables [….] De plus certains plastiques issus de l’amidon de mars, les racines de manioc, la canne à sucre ou la fermentation bactérienne du sucre ou des lipides ne dégrade pas automatiquement dans la nature et surtout pas dans l’océan ».

    Le piège sémantique.

    On comprendra mieux le piège sémantique qui est tendu au consommateur par les publicitaires et fabricants tellement habiles à nous faire prendre des vessies pour des lanternes et des poisons pour des remèdes, en apprenant que :

    • Biosource se dit d’une matière issue de la biomasse végétale ou animale qui subit par la suite des transformations chimiques.
    • Mais qu’il n’y a aucune équivalence entre biosourcé et biodégradable, l’un ne qualifie nullement l’autre. C’est un peu comme naturel et sain. Un produit naturel n’est pas forcément un produit sain. Ex : les amanites phalloïdes…

    Ainsi après vous avoir ébloui de leur rhétorique les fabricants essaient-ils de nous faire avaler des couleuvres.

    C’est ainsi que nous pouvons lire, sur le site bioplastiques.org :

    « Les bioplastiques sont des plastiques biosourcés . Fabriqués en partie ou en totalité à partir de matière végétale telles que le blé, le maïs ou la pomme de terre.  Ils contiennent au minimum 40% de matière d’origine végétale  [….] les bioplastiques ont la propriété d’être biodégradables »

    Et, plus loin :

    « Tous les bioplastiques se doivent d’être conformes à la norme européenne EN 13432 : 2000 Ils sont facilement identifiables par le label OK compost qui atteste de leur biodégradabilité de 90 % en 6 mois maximum »

    []source : http://www.bioplastiques.org/quest-ce-que-cest

    Vous ne serez pas surpris d’apprendre que le Club Bio-Plastiques est une association représentant l’ensemble de la filière française des bioplastiques !

    Juge et parti comme cela est de plus en plus courant dans la grande industrie où les « études » de non-toxicité sont souvent menées par des « scientifiques » grassement payés… par les fabricants des produits mis en cause.

    En fait qu’est-ce-que ce plastique qui est en train de transformer notre « société de progrès » en un monde de cauchemar ?

    Le plastique est constitué par un assemblage de « briques » appelées monomères auxquelles ont ajoute des adjuvants pour leur donner des propriétés nouvelles : plastifiantes (grâce aux phtalates) mais aussi charges et renforts, pigments, colorants, durcissant, catalyseurs, solvants, stabilisateurs et autres antioxydants, sont jetés dans ce véritable chaudron de sorcière que l’industrie chimique malaxe à longueur d’année pour notre plus grand profit… sans trop se préoccuper des retombées à long terme qu’auront les produits ainsi concoctés, sur la nature et sur la population mondiale.

    Il s’en faut de peu qu’un produit inoffensif se transforme en véritable poison. Ainsi sous forme assemblée le polymère de styrène (Polystyrène) n’est pas toxique alors que le monomère de styrène est  génotoxique

    [source: http://www.inrs.fr/publications/bdd/fichetox/fiche.html?refINRS=FICHETOX_2]

    C’est pourquoi nous mettons en garde les utilisateurs des plastiques face aux chocs thermiques pouvant fragiliser (il faut dire fragmenter) ces assemblages et faire migrer ces monomères dans les aliments en contact.

    Que signifie alors le terme biodégradable ?

    D’après l’ADEME une définition faisait consensus en 2005. Cette définition affirme qu’ « un matériau est dit biodégradable s’il est dégradé par des micro-organismes. Le résultat de cette dégradation est la formation d’eau, de CO2 et/ou de CH4 et, éventuellement, de sous-produits – résidus, nouvelle biomasse – non toxiques pour l’environnement ».

    Ainsi pourra-t-on affirmer d’un plastique qu’il est biodégradable que s’il se transforme en eau, CO2 et autres molécules (ex: méthane) n’ayant pas effets toxicologiques sur le milieu.

    Les conditions à réunir : Perte de 90% en masse en 6 mois dans un milieu naturel (= eau douce, eau salé, sol).

    De la même façon et dans les mêmes conditions sera-t-il compostable.  Les conditions seront les mêmes : Perte de 90% en masse. Sauf que cette transformera devra se réaliser en 3 mois dans un composteur industriel.

    Dans les autres cas on parlera de plastique fragmentable. C’est à dire : qui libère les monomères potentiellement toxiques. Ou encore on le qualifiera de nondégradable : le polymère reste entier mais les adjuvants, phtalates par exemple, sont libérés… à nos risques et périls.

    Le label ok compost 

    Un label garantit aujourd’hui la propriété dégradable/compostable. Mais uniquement en milieu industriel  (selon la norme EN 13432 qui atteste la biodégradabilité des produits de 90% en 6 mois dans ce milieu industriel ). Or cette norme EN 13432 applicable au compostage industriel d’emballage, ne garantit absolument rien quant à l’environnement naturel !

    source : http://www.okcompost.be/data/pdf-document/Doc-09f-a-Les-exigences-de-la-norme-EN-13432.pdf

    Et c’est bien ce que pointe le rapport du programme des nations unis : ces plastiques dits biodégradables ou biosourcés ne sont pas aptes à réagir dans l’environnement naturel comme ils réagiraient dans un milieu industriel maitrisé à 55 degrés.

    Le terme biodégradable est ici galvaudé et destiné à nous induire en erreur: ok compost indique la compostabilité dans un milieu industriel en 6 mois mais, en employant  le terme « biodégradable » qui ne concerne que la biodégradabilité en milieu naturel, il trompe le  consommateur.
    Et nous devons dénoncer ce procédé sémantique qui sert à nous duper.

     Alors que faire ?

    Dans la conclusion  d’un rapport datant de 2005, l’ADEME dit que : « les concepts de biodégradation et de biodégradabilité demandent encore à être normalisés ce qui nécessite de définir non seulement l’environnement dans lequel se biodégrade le matériel ou le matériau (eau, sol, compost, enfouissement..) mais aussi l’échelle de temps attachée à cette dégradation » Et elle ajoute : « Très peu de travaux existent mettant en évidence une corrélation entre les tests de laboratoire et les expositions dans les conditions réelles  [….]  Actuellement, il existe ou se met en place toute une batterie de tests d’évaluation de la biodégradabilité… les plus utilisés en milieu aqueux (car reproductibles)…elles présentent l’inconvénient majeur de ne pas être représentatives des conditions réelles de biodégradation… d’autres méthodes plus proches du milieu naturel sont en cours de développement (2005) ».

    Conclusion : « Il est [donc] possible de conseiller des sacs biodégradables pour la collecte des déchets [que] là ou existe un système de collecte organisé associé à une unité de compostage industriel» [les mots entre « crochets » sont de notre fait].

    source:  https://www.ademe.fr/sites/default/files/assets/documents/23224_biodeg.pdf

    Pour pouvoir éliminer un plastique en compostage domestique  il faut viser le label Ok compost home.

    Pour en savoir plus : https://www.bo-sens.ch/blog/2017/04/04/ok-compost-home-de-vincotte/

    Pour notre part nous restons fidèles au crédo « primum non nocere » et pensons que la réponse ne peut se situer qu’en amont dans la baisse de la consommation de plastique « dégradables ou pas ».  Le meilleur déchet est celui que l’on ne produit pas. Et la meilleure garantie est celle qui nous évite d’avoir à nous protéger.

     

    Fanny AUGER – PRIMUM-NON-NOCERE

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